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27.9.2022

Entretiens structurés VS entretiens “au feeling”

Entretiens d'embauche structurés contre entretiens de recrutement “au feeling” ? Pour ma part, il n’y a plus débat ! Pourtant, comme beaucoup de recruteurs, j’ai longtemps avancé avec le sentiment d'avoir LA bonne intuition. Et tout n’allait pas si mal, convaincu du fait que “s’il y avait un doute, c’est qu’il n’y avait plus de doute”. Heureusement, il y a plusieurs années, j’ai découvert la méthode des entretiens structurés, et ma vie de recruteur a changé de dimension.

Non, l’entretien de recrutement au feeling n’est pas une méthode fiable 

Lors de mes premiers pas dans le recrutement et comme beaucoup de recruteurs, j’ai eu la chance de suivre une formation express en 2 temps : “une tape dans le dos” et un “vas-y cherche-moi un Head of”. Un apprentissage dans la douleur.
Je pensais également qu’il fallait participer à des entretiens avec des consultants “experts” pour m’améliorer. Ce qui n’est pas totalement faux.


Pas d’amélioration notable à court terme : reproduire “bêtement” ces entretiens devenait même contre productif, car cela me poussait inconsciemment à ne pas chercher à faire autrement, et donc à refouler les évidences. Mais à la longue, une prise de recul salvatrice : tout semblait se jouer dans les 10 premières secondes (la fameuse bonne impression). Soit 1% d’évaluation, 99% de feeling !

Désormais, avec l’expérience, je vois l’entretien classique comme très subjectif, quand il n’est pas complètement discriminatoire…

L’entretien structuré en quelques mots ?

L'entretien structuré est une méthode qui consiste à :

- utiliser une trame commune de questions définies à partir du besoin en recrutement exprimé en amont (c’est toujours mieux de savoir et comprendre ce que l'on cherche),
- définir un système de notation pour jauger de la pertinence des réponses sur une même échelle,
- objectiver la prise de décision.

La structuration de l'entretien permet d’évaluer les mêmes compétences pour tout le monde, poser les mêmes questions à chaque candidate ou candidat.

Elle implique de se réunir avec les collaborateurs impliqués dans les futurs recrutements pour identifier :

- des critères de sélection (différents pour chaque opportunité),
- les hiérarchiser (prioritaires, rédhibitoires…)
- les meilleures questions à poser et les mettre à jour régulièrement pour que les futurs candidats n’arrivent pas avec toutes les réponses…


Pourquoi se pencher sur la méthode de l’entretien structuré ?

L’avantage majeur de cette méthode : harmoniser les résultats et favoriser l’équité. Si deux candidats ont été reçus par deux collaborateurs différents et que chacun a posé des questions totalement différentes, comment peut-on comparer équitablement ?

L’idéal est donc de répartir les critères entre les différentes personnes qui mènent l’entretien.

Ensuite, les entretiens structurés permettent de lutter contre nos meilleurs ennemis, reconnus comme principaux responsables des failles de l’entretien au feeling : les biais cognitifs. Et le plus désastreux d’entre eux (celui que j’évoque plus haut) qui conduit à orienter l’entretien pour confirmer sa bonne première impression !

Les collaborateurs gagnent également un temps précieux grâce à l'utilisation de cette méthode : ils ont la sensation d’être mieux préparés à l’exercice et s’autorisent moins à sortir des sentiers battus avec des questions insolites.
Petit aparté au passage sur ce dernier point : les questions insolites peuvent permettre toutefois de tester des réactions face à une situation inattendue ou encore de déceler certains aspects de la personnalité, surtout si elles sont posées à tous les candidats.

Dans tous les cas, je constate qu'avec l'entretien structuré l'évaluation de chaque profil se trouve facilitée, tout comme le choix final, et les retours à réaliser auprès des candidats rejetés sont plus constructifs.

Les (petits) inconvénients des entretiens structurés

Constat évident lorsque l’on se penche pour la première fois sur la méthode de l’entretien structuré : la mettre en place demande une charge de travail conséquente et nécessite de sortir de sa zone de confort !

Outre la nécessité de définir les critères à évaluer, il faut également :

- Rédiger les questions qui vont venir évaluer chaque compétence clé. Ces questions tournent autour de la connaissance “métier”, des réalisations ou situations rencontrées lors des précédentes expériences.

- Construire un référentiel de bonnes réponses et l’associer à une échelle de notation adaptée.

- Reproduire l’exercice pour CHAQUE poste ouvert.

- Prévoir un temps de formation pour s’assurer que la méthode soit bien appliquée par tous et l’inscrire dans la durée comme une “best practice” de l’entreprise.

Cette méthode implique donc une remise en question des pratiques utilisées et une volonté forte de faire évoluer les process (la base) ! Il sera évidemment très difficile de faire bouger les lignes tant que la direction ou les collaborateurs (recruteurs compris) continueront de se considérer (au choix) : très à l’aise avec leur intuition / beaucoup trop performant en entretien non structuré pour avoir besoin de faire autrement.

Si le temps et la bonne volonté restent des atouts précieux, mettre en place cette méthode en partant de zéro peut nécessiter une expertise que certaines entreprises ne peuvent pas se permettre de mobiliser, bien souvent par manque de ressources internes. Pour autant, il existe des solutions pour remédier à cette problématique, comme l’intervention de recruteurs en mission par exemple.

Ce qu’il faut retenir avant de se lancer

L’entretien au feeling peut être intéressant pour créer un lien relationnel avec le candidat, mais ça s’arrête là. Si vous souhaitez avancer avec des profils adaptés à vos opportunités, l’entretien structuré vous offre une plus grande fiabilité : il est équitable, facilite la comparaison et permet de gagner du temps.

Il est cependant recommandé de le combiner avec une ou plusieurs autres méthodes d’évaluation objective (comme un test technique, un cas pratique, une mise en situation…) pour augmenter votre réussite dans la sélection. Inutile de préciser que chaque processus doit également être adapté aux spécificités des postes à pourvoir, des équipes, des cultures et des évolutions des entreprises.

Lors de sa mise en œuvre, vous serez peut-être confrontés à une désagréable sensation : celle de passer un moment insipide où les questions manquent de créativité. Sur le papier, conduire des entretiens identiques avec chaque candidat ne fait pas rêver. Mais n’oubliez pas que la qualité des questions posées aura un impact positif sur l’expérience vécue par ce dernier, et vous obtiendrez à coup sûr des réponses plus convaincantes : le profil adéquat aura de meilleurs arguments pour justifier les choix qu'il a faits, il se démarquera plus facilement.

Si la crainte de perdre en fluidité est trop pesante, penchez-vous sur la méthode STAR (une variante de l’entretien structuré), qui permet à chaque candidat de s’exprimer plus librement sur ses expériences professionnelles passées en utilisant des questions plus ouvertes.

Enfin, si le challenge vous semble trop corsé, optez pour une des nombreuses déclinaisons (comme l’entretien semi-structuré : un cadre plus souple en début et fin d’entretien) qui vous offrira un minimum d’objectivité et sera moins contraignante dans sa mise en œuvre.

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